Assassinat de Adji Sarr, attaques en série… : les révélations explosives du téléphone de Mor Guèye de la «Force spéciale»
Le téléphone de Mor Guèye a parlé. Ce dernier fait partie des onze personnes arrêtées et accusées d’avoir voulu profiter de la manifestation interdite de Yewwi Askan Wi, la semaine dernière, pour semer le chaos à Dakar.
Leurs cibles : des intérêts français, comme les magasins Auchan, la centrale électrique du Cap des Biches, le siège de la Direction générale des élections, celui du Conseil constitution, la RTS et les maisons de certaines personnalités du pouvoir. Leurs noms de code : «Force spéciale» et «Black panthère».
Projet d’assassinat de Adji Sarr
D’après Les Echos, Mor Guèye avait l’habitude de communiquer par Whatsapp et Telegram. Soit pour tenir informés ses correspondants de ses actions soit pour recevoir d’eux des directives. L’essentiel de ses échanges, captés par les enquêteurs de la Sûreté urbaine (SU) et repris par le journal dans son édition de ce vendredi, étaient effectués avec Max Kilumati.
Ce dernier, avec Ousseynou Seck alias Akhenaton, sont présentés comme les commanditaires des opérations déjouées par les Forces de défense et de sécurité. Akhenaton est connu pour ses diatribes sur les réseaux sociaux contre le pouvoir de Macky Sall.
L’exploitation du téléphone de Mor Guèye a permis aux policiers d’affirmer que la bande planifiait des actions contre leurs cibles présumées depuis le 9 avril, date à laquelle ce dernier reçut un message de Max Kilumati qui partageait avec lui ses «inquiétudes pour l’assassinat de Adji Sarr», la masseuse qui accuse Ousmane Sonko de viols et menaces de mort.
Mor Guèye, d’après la police, ne chassa pas les «inquiétudes» de Max Kilumati en lui répondant que ce serait un gros risque de chercher à tuer l’accusatrice du leader de Pastef.
Créer une diversion pour saboter le TER
Les Echos signale que quarante-cinq jours après ces échanges, soit le 24 mai, Kilumati aurait demandé à Mor Guèye, via un message, de passer à l’action et d’exprimer ses besoins «en cas d’invalidation de la liste de Yewwi Askan Wi».
Dans sa réponse, rapporte le journal, ce dernier informe son interlocuteur qu’il était déjà très en avance dans la mise en place de son dispositif. Qu’il avait déjà acquis des couteaux, des matraques, des herses, de l’essence… Et qu’il avait déjà identifié les cibles à attaquer et assuré la coordination pour des actions à Ziguinchor et Bignona.
D’après les enquêteurs, le téléphone de Mor Guèye révèle aussi qu’une première attaque était programmée la nuit du 4 juin. L’heure de l’intervention était fixée, selon la police qui a fouillé l’appareil, par Max Kilumati.
Son interlocuteur lui aurait demandé de mettre à sa disposition une voiture, «pour faciliter leur déplacement», en lui soufflant que la stratégie, c’était de changer d’habits après chaque attaque et de commencer par incendier au cocktail Molotov les postes de péage. L’idée étant d’attirer les forces de sécurité dans ces lieux pour ensuite s’en prendre au TER avec toujours des cocktails Molotov.
Aliou Sall, Auchan, la RTS…
Le lendemain, le 5 juin, changement de tactique. A 9 heures 21, Mor Guèye propose dans un message d’attaquer d’abord les sièges de la Direction générale des élections et du Conseil constitutionnel ainsi que les domiciles de certaines autorités.
Max Kulimati, qui aurait manifestement approuvé le plan, lui suggère d’organiser ses hommes par dix et que chaque groupe se charge d’une cible pour des attaques simultanées. Il ajoute : «Toute communication doit être physique. Descendez sur le terrain pour le travailler (sic) et soutenez les autres dans le besoin.»
Les Echos rapporte que la police a en outre capté sur le téléphone de Mor Guèye un message vocal où Max Kulimati demande en plus à ce dernier de brûler la maison de Aliou Sall à Guédiawaye et d’attaquer les magasins Auchan ainsi que la RTS et des entreprises françaises.
Le 15 juin à 16 heures 47, informe le journal, Mor Guèye reçoit un autre message, cette fois-ci d’un certain «Aliou commandement». Ce dernier listait du matériel qui semblait destiné à la fabrication de cocktails Molotov : «bouteille de moutarde, bidons d’huile usés, bouteille d’acide, une quantité importante de bouteilles de 1 litre». La même source souligne qu’en concluant son message, «Aliou commandement» a lancé «Na fépp boy» (mettez le feu partout).
Mor Guèye, un ancien sapeur-pompier
Si Mor Guèye envoyait et recevait tous ces messages c’est que d’après les enquêteurs, il était le spécialiste des incendies de la bande. Les Echos le présente comme un ancien militaire, passé par la Brigade nationale des sapeurs-pompiers.
«Il maîtrise le maniement des armes et connaît parfaitement les conséquences d’un feu, avance le journal. En effet, il est spécialiste dans le domaine de la sécurité-incendie. C’est lui qui fournissait au groupe toutes les stratégies d’attaque au cocktail Molotov. C’est lui aussi qui se chargeait du mélange des produits et substances chimiques pour créer un effet explosif.»
Mor Guèye et ses dix complices présumés seront présentés au procureur de la République, ce vendredi, d’après Source A. Ils sont poursuivis, notamment, pour complot contre l’autorité de l’Etat, association de malfaiteurs, détention illégale d’arme à feu et financement du terrorisme.