Dr Amadou Sow sur la crise institutionnelle au sénégal : »Cette situation est à l’origine de la volonté de reporter les élections, tel que formulé par des acteurs et analystes de la vie politique sénégalaise. »
Spécialiste en économie de l’Énergie politique , Dr Amadou Sow s’est penché sur l’actualité politique qui défraie la chronique avec la tension palpante entre l’opposition et le régime en place suite au report des élections . Une occasion pour le Professeur d’apporter une lecture en ce sens non sans envoyer un message fort aux hommes politiques .
- Le dispositif légal et institutionnel qui encadre le processus électoral souffre de plusieurs tares congénitales, parmi lesquelles :
– il est anticonstitutionnel, si l’on considère ne serait-ce que (i) la loi sur le parrainage avec son système de tirage au sort qui contrevient à cette disposition fondamentale de notre constitution qui veut que tous les citoyens soient égaux devant la loi;
– il est inopérant si l’on considère ne serait-ce que les modalités de mise en œuvre du filtrage par les parrainages ou celles relatives à l’appréciation de l’exclusivité de la nationalité sénégalaise;
– il subit lourdement un déficit de retour du Conseil constitutionnel sur la constitutionnalité des lois. - De ce fait, on se retrouve avec 19 candidatures validées sur cette base, et d’autres invalidées parmi lesquelles certaines affichent une légitimité historique et politique sans conteste.
- On a donc deux groupes de candidats, validés et invalidés, sur la base d’un dispositif électoral devant lequel les citoyens sont inégaux, et inefficaces parce que éliminant certains candidats parmi les meilleurs pour notre pays, pour notre économie, nos familles, notre sécurité, notre système de santé, notre souveraineté …!
Cette situation est à l’origine de la volonté de reporter les élections, tel que formulé par des acteurs et analystes de la vie politique sénégalaise.
La difficulté à ce stade de ma réflexion porte sur le dilemme qui émerge entre :
– le report des élections, qui serait une entorse à l’intangibilité des dispositions relatives à la durée du mandat, mais permettrait non seulement de rectifier la procédure légale et réglementaire ci-dessus incriminée, mais encore d’éviter à notre pays des contentieux pré et post électoraux dont personne ne mesure l’ampleur et
– le strict respect du code, spécifiquement ses dispositions calendaires.
Entre les deux, l’arbitrage qui s’impose à la classe politique sénégalaise doit être exclusivement soutenu par l’intérêt supérieur de la nation, le sens du dépassement et de l’inclusion nationale. Mais surtout la paix et l’unité nationale sans lesquelles il n’y aura point de développement.
La perspective de la souveraineté économique pour faire du Sénégal un pays d’espoir pour ses filles et fils à la recherche d’hypothétiques eldorados par-delà les océans, serait caduque en l’absence de paix et d’unité nationale.
Soyons debout, les cœurs ouverts, la main dans la main, dans un Senegal de Teranga. Ne laissons s’installer ni la violence, d’où qu’elle vienne et de quelque nature qu’elle soit, ni la haine, ni les pensées uniques fractionnistes.
La beauté d’un pays est fragile. Comme toutes les beautés, elle s’entretient.
La vague de libération en cours de détenus dits politiques et la concertation nationale appelée sont des signaux forts dans cette direction, si l’on se place dans la perspective d’élections paisibles et inclusives d’où le peuple sénégalais sortira encore une fois fier et altier, après les ténébreux tumultes traversés depuis plusieurs années.
Dr Amadou Sow