[Éclairage] Ousmane Sonko, Adji Sarr et la “corruption de jeunesse” du procureur !
Corruption de jeunesse. Un nouveau délit dans le Code pénal ? Beaucoup se sont interrogés sur cette «infraction» prononcée, hier par le procureur lors de son réquisitoire dans l’affaire opposant le leader de Pastef, Ousmane Sonko à l’ex masseuse de Sweet Beauty, Adji Sarr. Que ce soient les professionnels du droit ou les profanes. « Il a requis à titre subsidiaire que Ousmane Sonko puisse être déclaré coupable de corruption de jeunesse. Mais ces termes-là ne sont pas contenus dans le Code pénal qui parle plutôt de corruption de mineur », a précisé le chroniqueur judiciaire Daouda Mine, par ailleurs Directeur des supports numériques de GFM, joint au téléphone, ce mercredi 24 mai.
« Peut-être que la langue du procureur a fourché »
La corruption de mineur est prévue par l’article 320 pair du Code pénal. Lequel dispose que le fait de favoriser ce fait est puni d’un emprisonnement d’un an (1) à cinq (5) cinq ans et d’une amende de 100000 FCFA à 1500000 FCFA. « Donc demander à ce qu’il (Sonko) soit condamné pour corruption de jeunesse, peut-être sa langue a fourché», mais l’incrimination n’a pas de base juridique.
Toujours lors de sa prise de parole, le parquet général a visé à titre principal, le viol et à titre subsidiaire, la «corruption de jeunesse ». Là, Daouda Mine y a apporté des explications. Il a aussi donné un sens à cette requête. «C’est courant de voir un procureur de la République demander la requalification d’un fait lorsqu’il se rend compte au cours des débats que les éléments constitutifs de l’infraction initiale qui ont été retenus contre un accusé ou un prévenu pouvaient être tout simplement rejetés. Il peut sur la base des éléments discutés à la barre requérir une requalification entre deux infractions concordantes », a renseigné celui qui dirige aussi la Commission de la carte nationale de presse.
Il cite en exemple quelqu’un qui est poursuivi pour viol. d’un enfant « Si on se rend compte que les éléments constitutifs de l’infraction ne sont pas établis, on vise automatiquement la pédophilie et on demande la requalification étant attendu que les peines qui sont prévues par les deux infractions sont pratiquement les mêmes », signale-t-il. Avant de poursuivre : «Maintenant lorsqu’on se rend compte qu’une infraction n’est pas établie et qu’il y a une infraction moins grave qui peut être retenue à partir de ce moment-là, on demande une disqualification des faits ».
« Il quitté les dispositions de l’article 320 pour tomber sur les dispositions de l’article 320 pair »
Daouda Mine de relever qu’aujourd’hui «quand on voit le réquisitoire du procureur, il a quitté les dispositions de l’article 320 pour tomber sur les dispositions de l’article 320 pair ». Il éclaire davantage : « Ce qu’il faut comprendre est que l’article 320 regroupe 3 articles -320, 320 bis et 320 pair. Ils prévoient respectivement le viol, l’attentat à la pudeur et la corruption de mineur. Ousmane Sonko est poursuivi à titre principal pour viol qui est tout acte de pénétration sexuelle de quelque nature qu’il soit commis sur la personne d’autrui par violence contrainte, menace ou surprise ».
A ses yeux, pour que le juge puisse arriver à une condamnation, il faut impérativement que les éléments constitutifs de cette infraction soient réunis. « Quand le procureur se rend compte que ces éléments constitutifs peuvent manquer dans le cadre d’une affaire, il peut se rattraper en demandant que le juge si jamais il estime qu’il n’y a pas viol qu’il puisse se rabattre sur une autre incrimination. C’est dans ce sens qu’il a un tout petit peu fait un glissement vers 320 pair du Code pénal qui vise la corruption de mineur », fait-il savoir.
« Mon intime conviction »
Mais, dit le chroniqueur judiciaire, «mon intime conviction est que si jamais le juge ne retient pas le viol, il lui sera très difficile de retenir la corruption de mineur étant attendu que Adji n’était pas mineure au moment des faits». «Elle était âgée de 21 ans et par conséquent les dispositions de l’article 320 pair ne pourront pas être retenues contre Ousmane Sonko en ce qui concerne ce que Adji Sarr lui reproche ».
Ce dossier sera vidé le 1er juin prochain devant la Chambre criminelle de Dakar. En attendant, le procureur a demandé au juge de déclarer Ousmane Sonko coupable des faits de viols qui lui sont reprochés et de le condamner à une peine de dix (10) ans de réclusion criminelle. S’agissant de la requalification des faits en délit de corruption de la jeunesse, il a requis une condamnation de cinq (5) ans de prison et le paiement d’une amende de 2 millions de FCFA. A propos du délit de menaces de mort, il a requis cinq (5) ans de prison contre le leader de Pastef.
De son côté la partie civile Adji Sarr réclame 1,5 milliard de FCFA à l’accusé qui a brillé par son absence lors de ce procès «très » médiatisé.